L'expérience du tricycle valait le détour:
des villages sont hilares et s'écrient
"ah! un blanc paralytique!", et surtout, les gens
nous facilitent tout, un peu soucieux d'aider un blessé
: "patience!" ou encore "courage!" nous
disent les gens sur notre passage. Certains ont même
cru que Marco était un Américain rescapé
des Twin Towers...
Bien sûr, nous savions que la marcomobile ne permettrai
pas de nous mener à Brazzaville.
Les 10 jours passés immobilisés à Yaoundé
auraient suffi pour traverser le Gabon et le Congo à
bicyclette, et ce temps perdu, il faudra bien le rattrapper
autrement.
Le tricycle futuriste nous permettra quand même de totaliser
environ 200 km en quelques jours, avant de commencer l'autostop.
nous gagnons ainsi la frontière du Gabon en moulinant
et pédalant respectivement. La machine avance pas mal,
et il suffit de s'accrocher à une voiture quand la
côte est trop raide.
Mais qu'on ne s'y trompe pas!
On aurait trop vite fait de plaindre Marco, pauvre invalide
sur son fauteuil bleu comme les charriottes à malades
de Lourdes. Pendant ce temps là, Cédric, lui,
porte les bagages pour deux, et même si nous nous sommes
volontairement beaucoup déléstés à
Yaoundé, Cédric se retrouve chargé comme
un déménageur breton. On l'a même vu tirer
marco avec une corde dans des montées !
Le Cameroun est décidemment un pays assez sympa. Les
gens y sont certes plus dur d'accés qu'en Afrique de
l'Ouest, mais quand même ouverts, accueillants, et joyeux.
Nous n'avons jamais vu autant d'ivrognes que dans ce pays:
le dimanche, tout le monde titube, saoulé de vin de
palme!
Au poste frontière pour passer au Gabon, nous tombons
sur un policier ivre.
Il demande sévèrement nos passeports, exige
des tas d'excuses pour un rien, se met à roupiller
en lisant le visa du Cameroun, se réveille, se fâche.
Nous trouvons un autre douanier, plus sobre, en état
de nous donner le tampon que nous voulons. Le premier débarque,
pas content. "Il faut payer", bredouille-t-il.
Nous avons déjà obtenu nos tampons réglementaires,
et donc nous n'avons plus rien à faire en sa compagnie:
marco lui arrache des mains les passeports qu'il voulait nous
confisquer. Pendant qu'il s'énerve contre marco, cédric,
les a déjà récupérés discrétement
et file les planquer.
Nous prenons la fuite pendant que les policiers s'énervent
les uns contre les autres...
A chaque repas, nous découvrons de nouveaux plats
du coin. ici nous mangeons du singe et de la vipère,
là de l'éléphant et de l'antilope, et
même, le plus fin, du crocodile. Nous ne mangerons pas
notre prochain, bien que la région soit encore assez
cannibale par endroits.
Nous traversons en pirogue le fleuve qui nous sépare
du Gabon.
En entrant au Gabon, commence l'autostop.
Imaginez: 1 300 km avec un vélo, un tricycle à
polio, des sacoches, deux personnes, sur des pistes presque
tout le temps défoncées. Nous aurions aimé
faire ce trajet à vélo. Mais, en terme de sport,
nous serons pas déçus...
nous sommes transportés d'abord par un forestier portugais
champion de sport automobile qui nous montre ses talents sur
des pistes sinueuses. Puis par un grumier chargé de
47 tonnes de bois, qui nous transporte de nuit sur des pistes
de montagne défoncées. Ensuite par des pick-up,
des camionettes, des camions, tantôt entassés
comme des déportés, tantôt secoués
comme dans un shaker.
Nous ne verrons donc pas grand chose du Gabon, où
nous passons deux jours.
Pour nous, l'essentiel c'est de gagner bien vite Brazza, où
la maudite cheville sera libérée de son plâtre,
et donc prendre un nouveau départ à vélo.
IL s'agit de ne pas prendre de retard sur la fin de notre
raid (Namibie et Afrique du Sud).
Nous avons passé l'équateur au Gabon : fini,
la saison des pluies ! Nous sommes à présent
en pleine hiver austral. rien de grave, rassurez-vous : la
saison est sèche, soleil éclatant et chaud toute
la journée. Nous reprenons le bronzage perdu, même
si, c'est vrai, nous mettons un pull le soir, la température
tombant à 25° (...nous sommes devenus un peu douillets).
L'arrivée au Congo se passe mieux que prévu:
nous redoutions un peu cet Etat policier qui sort tout juste
de la guerre civile, où l'on se fait (dit-on) attaqué
par de nombreux coupeurs de route. En fait, les Congolais
sont sympathiques, accueuillants, et seulement désolés
de l'état désastreux de leur pays au sortir
de la guerre. Nous croisons sans cesse des policiers, des
gendarmes, des militaires, et à chacun il faut montrer
nos passeport. Toutes ces formalités sont lourdes,
mais routinières: le contrôleur invente un problème
qui n'existe pas, et demande donc de l'argent pour fermer
les yeux là-dessus. Nous lui disons donc de fermer
les yeux, mais nous gardons notre argent.
Une fois, il nous est tout de même arrive un incident.
Quelqu'un a dénoncé à la police que Cédric
a photographié le camion (civil) qui nous transportait.
Cédric laisse l'appareil à Marco, et se rend
au poste de police où il est convoqué. On l'informe
qu'il faut une autorisation pour photographier, surtout lorsqu'il
s'agit d'éléments aussi stratégiques.
Cédric est ramené à son vélo,
pour qu'il livre la pellicule aux autorités. Pendant
que Marco cache dans son dos l'appareil photo, cédric
fait semblant de le trouver dans son vélo, et en tire
une pellicule vierge qu'il déroule et donne au policier.
Et le bonhomme s'en va en tenant fièrement son butin!
(si le policier en question lit un jour ces lignes, et s'il
s'est rendu compte de la supercherie, alors, nous lui demandons
pardon...).
Nous sommes alors à Nyanga, et 180 km nous séparent
de Dolisie. nous pensons que deux ou trois heures suffiraient
pour ce trajet, d'autant qu'il s'agit de la Nationale 3. En
fait, ce sera un véritable périple d'une journée
entiére !
Nous partons de bon matin pour arriver le soir, de nuit, à
Dolisie.
Nous sommes installés dans la remorque d'un vieux camion
chargé de manioc,
entassés parmi des dizaines de Congolais. Si vous essayez
de déplier une jambe ou de changer votre bras de position,
vous êtes aussitôt réprimandé par
tous vos voisins. La piste est si mauvaise et si poussiereuse
que nous sommes recouverts de sable et de poussiere, des pieds
a la tête, visage compris. Des vieilles mamans africaines
entonnent des chants locaux, repris en choeur par des miltaires
cagoulés et armés de Kalachnikov...
Arrivés le soir à Dolisie, il est 19h 30. Nous
courrons pour ne pas louper le train prévu à
19h00. Pas de panique! il partira en fait à minuit
passée... Aprés une journée entière
passée à parcourir 180 km, nous avions en effet
décidé de prendre le train, pour éviter
de passer 3 jours à faire les 350 km qui mènent
à Brazzaville. Par voie ferrée, au moins, nous
y serons dans trois ou quatre heures... Le "train"
mettra en fait dix sept heures à faire ce trajet. Encore
une fois assis par terre dans le couloir d'un train plein
à craquer, nous ne trouvons pas le sommeil, et réussissons
finallement à trouver une place plus confortable dehors,
aggrippés à la locomotive. Nous nous demandons
encore si nous n'avons pas été doublés
par des piétons... Nous voici enfin à Brazza,
ville charmante en dépit des impacts de balles qui
trouent la plupart des façades. Nous sommes logés
ici par l'infirmier du CMS de l'ambassade de France (décidement!!)
qui est adorable, et qui rendra sa cheville à Marco
pour le 27 septembre.
Nous avons déjà trouvé un acheteur pour
la marcomobile et venons de récupérer le VTT
de Marco à l'aéroport, où nous l'avions
fait acheminer depuis Yaoundé (ainsi que sa chaussure
gauche...).
Plus qu'à trouver un avion léger qui puisse
nous faire franchir l'Angola en guerre, et nous déposer
en Namibie...